Récompense et perversion
En tant qu’êtres humains, nous avons plusieurs besoins vitaux, dont celui de manger.
Pour répondre à cette nécessité vitale, notre organisme affûté a mis au point un mécanisme imparable, le circuit de la récompense.
En effet, lorsque nous sommes en hypoglycémie ou lorsque notre estomac est vide, se déclenche la sensation de faim, soit via la sécrétion de ghréline par l’estomac, soit via la sécrétion de neuropeptide Y par l’hypothalamus.
Cependant, confronté à cette sensation de faim, l’individu peut décider de ne pas manger ! Le besoin émis par le corps est alors nié.
Qu’en est-il du plaisir?
Afin d’amener l’individu à renoncer à cette décision de privation d’alimentation, notre fabuleux organisme humain a adjoint la sensation de plaisir au comportement initial “manger” qui répond à une nécessité vitale.
Le but étant de renforcer l’action afin d’inciter à répondre à la nécessité.
Et la récompense alors?
Afin de s’assurer que l’individu ne renonce pas à manger, la sensation de plaisir est elle-même renforcée par la récompense, de telle sorte que l’individu ne puisse plus se passer de cette récompense.
Ce mécanisme est inscrit au plus profond de notre système nerveux central ancestral de sorte qu’il devienne un véritable instinct de survie. En effet, le circuit de la récompense (ou circuit hédonique) motive l’individu à agir en récompensant l’action qui a rétabli l’équilibre interne (dans notre cas, manger permet de répondre aux besoins énergétiques de l’organisme).
La perspective d’une prise alimentaire déclenche au niveau du cerveau un signal annonçant une récompense et partant, la sécrétion de dopamine. Ceci va engendrer une activation motrice (se rendre dans la cuisine, ouvrir le placard, prendre le paquet de gâteaux) et la focalisation de l’attention sur la tâche à accomplir pour satisfaire le besoin et ainsi rétablir l’équilibre interne.
Ensuite, à force de répétition de l’action gratifiante pour en consolider les traces nerveuses se crée une mémoire de la récompense (comme pour la punition où a contrario la répétition d’expériences désagréables va aboutir à une modification du comportement).
La motivation de la plupart de nos comportements est donc la RÉCOMPENSE.
Oui mais…
Notre société actuelle a permis une perversion de ce circuit de la récompense. On pense par exemple au sucre, qui trop souvent associé à la récompense se transforme en addiction.
De même, on constate que l’alcoolisme, particulièrement chez les jeunes, provoque une altération des fibres nerveuses du tronc cérébral et par conséquent une modification du circuit de la récompense, induisant ainsi une hypersensibilité à la récompense qui conduit à un renforcement de la dépendance.
Par ailleurs, comme ce circuit ne concerne pas uniquement l’alimentation mais tous nos besoins vitaux, une absence de reconnaissance professionnelle répétée, donc un piétinement du besoin fondamental de récompense va conduire au burn-out.
Et donc…
De manière générale, le circuit de la récompense permet l'apprentissage de réactions émotionnelles, d'actions motrices et de comportements indispensables à la survie de l'individu et de l'espèce, telles que le maintien de l’homéostasie et les apprentissages fondamentaux.
Il est cependant crucial de veiller à un bon fonctionnement de celui-ci pour éviter les dérives telles que les addictions diverses et les pathologies psychiques.
Comment? L’idée est d’éduquer notre système de récompense en le sensibilisant à d’autres stimulus. En matière alimentaire, on privilégie une nourriture variée, parfums, couleurs, saveurs…
En ne négligeant pas non plus d’autres sources de plaisir: l’activité physique modérée (une activité physique trop intensive peut être le signe d’un dysfonctionnement voire d’une addiction puisqu’elle aussi est source de sécrétion de dopamine), le repos, la sexualité, l’art et la musique entre autres.
« Que de bonheurs possibles dont on sacrifie ainsi la réalisation à l’impatience d’un plaisir immédiat »