Enfance et liberté, nouveau paradigme ?

Quelle douleur que cette blessure portée depuis l’enfance… celle d’être nié dans son intégrité, celle d’être considéré comme sans avis, celle de ne pas être écouté tout simplement !

Liberté bafouée, sous le joug des injonctions permanentes, en famille et à l’école.

Pendant de longues années, aspirer à « être grand », attendre désespérément comme une quête du Graal, la clé vers la liberté d’être soi, et puis être déçu, se rendre compte du temps perdu à attendre. Car, la blessure est toujours là, bien profonde. Un regard, une parole suffisent à la raviver, comme une poignée de sel jetée sur une plaie vive.

Les « on ne fait pas ça, ça ne se fait pas », « tiens-toi bien », « on ne dit pas ça », « finis ton assiette », « va te coucher », « ne crie pas », « ne cours pas », suivis à l’adolescence des « non tu n’iras pas », toujours dépourvus d’explications et énoncés au nom de la sacro-sainte autorité parentale, sous prétexte d’une pseudo-connaissance de la vie, sont toujours vivaces, ancrés dans la chair.

Que c’est doux de prendre le temps de pratiquer la communication non violente au lieu de la violence éducative ordinaire, que c’est agréable un espace de non-jugement où chacun est en mesure d’exprimer ses besoins et les émotions suscitées par le non-respect de ceux-ci !

Devenir parent permet de mesurer l’effort quotidien d’une telle démarche pour être capable d’exprimer à ses enfants et son conjoint ses besoins au lieu de crier, de dire non, d’imposer l’autorité gratuite qu’on a subie. Effort d’autant plus grand que comme dans d’autres circonstances (ne pas laisser pleurer un bébé, allaitement long…), on se heurte souvent à un entourage toujours empreint de tradition autoritaire où les enfants n’ont pas droit au chapitre, où ils doivent être éduqués, voire dressés.

Gratitude, oui gratitude envers cet entourage qui nous rappelle que cette blessure est toujours vivante et à guérir, car dès qu’elle est guérie, nous ne sommes plus titillés par ces stimuli. Dans un espace de confiance en notre posture car émanant de notre cœur, nous ne sommes plus touchés par chaque parole blessante, remarque ou réprimande, chaque punition adressée à nos enfants par un membre de la famille ou un autre parent. Nous ne sommes plus touchés en plein cœur, nous ne sortons plus de nos gonds, nous savons que les efforts engendrés (coût d’une école alternative, pratique quotidienne de la parentalité bienveillante et de la communication non violente, car il faut du temps avant que cela ne devienne des automatismes) ne peuvent être balayés, car nous aidons nos enfants à construire leur autonomie, à consolider leur confiance en eux, en suivant leur élan naturel.

Effort mais pour une telle récompense, quand ils se sentent, par la force de l’exemple, libres d’exprimer leurs besoins, leurs émotions, quand de leur propre chef ils participent à l’organisation familiale dans un souci de contribution et d’appartenance au groupe, quand ils élaborent des stratégies de satisfaction des besoins de chacun.

Quelle joie quand ils racontent leur journée dans une école démocratique où la liberté d’expression de chacun sous toutes ses formes est respectée, où des processus de respect et d’écoute de l’autre sont mis en place et réinventés chaque jour !

Quel plaisir de les voir danser, sauter, crier, courir à travers la maison sans crainte d’être réprimandés car confiants que si une limite (c’est-à-dire si le besoin d’un autre membre de la famille est entravé) est dépassée, l’émotion générée par ce dépassement sera calmement exprimée et une solution qui convient à chacun élaborée !

Quel émerveillement de voir leur empathie naturelle soutenue dans un souci constant du bien-être de l’autre, dans une attitude de partage.

Et si c’était ça le monde de demain, le nouveau paradigme ? La crise sanitaire de cette année 2020 a conduit nombre d’entre nous à mener une réflexion sur un « monde d’après », sans inégalités sociales, avec plus de respect envers la nature. Et si tout commençait par les enfants ? Par notre attitude de parents ? Si le respect de l’autre, le respect de la nature commençait par l’écoute de l’enfant, dans ses besoins, dans son élan naturel vers l’autre ?


Précédent
Précédent

Time is money

Suivant
Suivant

Ouvrir son cœur